Design Thinking, des idées à la tonne.

Design Thinking, des idées à la tonne.

Gaëtan Namouric
La génération d'idées est un moment critique du design thinking. L'objectif? Produire du volume, du gros volume! Avec le temps, les formules se sont multipliées. Même si la prudence est de mise, elles ont des choses à nous apprendre. En voici un inventaire pratique.
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Gaëtan Namouric + MidJourney (V5)

Avertissement

Le design thinking popularisé par IDEO dans les années 90 repose sur cinq étapes bien connues : empathie, définition, idéation, prototypage et déploiement. La méthode a connu une telle popularité que certains consultants ou firmes-conseils ont voulu leur part du gâteau. Certains de ces processus sont même protégés par des brevets, et certaines marques sont déposées, ce qui appelle à la prudence. Cette méthode est le fruit de plus de 80 ans de recherche publique et de contribution d'immenses esprits tels que John E. Arnold, Bruce Archer, Hebert Simon, Donald Norman, Peter Rowe, Bill Moggridge ou encore David Kelley — nous en avons d'ailleurs raconté l'histoire dans cet article. Le design thinking est donc un bien public, qui appartient à tout le monde en général, donc à personne en particulier.

Parfois, ces méthodes se revendiquent comme "étant du design thinking", or un atelier de design thinking d'une journée ou deux, ça n'existe pas. Impossible de comprendre l'utilisateur dans un temps si court. Impossible de définir un problème sans lui. La plupart du temps, ces nouvelles propositions se concentrent sur la génération d'idées et le prototypage, minimisant l'étape d'observation et de compréhension de l'utilisateur — pourtant cruciale dans un processus de design thinking. Cependant, elles ont l'intérêt d'enrichir davantage l'étape de génération d'idées, parfois intimidantes pour les organisations.

Maintenant que les bases sont claires, voyons ce que ces ateliers peuvent nous apporter de bon.

Hackathon

À mi-chemin entre le piratage et le marathon, un hackathon est un événement de courte durée, généralement de 24 à 72 heures, au cours duquel des équipes de développeurs, designers, experts du domaine et autres participants collaborent pour créer des prototypes fonctionnels de solutions technologiques en réponse à un problème spécifique ou à un thème donné. C'est Sun Microsystems qui a organisé le premier Hackathon en juin 1999, lors d'un événement appelé "OpenBSD Hackathon", qui a certainement contribué à populariser le terme.

  • La plupart du temps, le hackathon vise à générer des solutions technologiques, comme une nouvelle fonction pour un logiciel.
  • L'idée est de mobiliser les gens et de créer un sentiment d'urgence ou d'excitation. Un hackathon est souvent festif, électrisant et basé sur l'esprit de corps.
  • Dans sa version originale, le hackathon peut générer une fatigue intense, après 24 à 72 heures sans sommeil.
  • Des versions moins "brutales" existent, surtout pour mobiliser les institutions à but non lucratif ou des institutions éducatives, pour stimuler l'innovation, l'esprit d'équipe ou le maillage entre les organisations.

Design Thinking Jam

C'est à Adam StJohn Lawrence et Markus Hormess, cofondateurs de WorkPlayExperience en 2011 que l'on doit le concept de Design thinking Jam. La méthode ne cache pas sa filiation avec la démarche initiale, et son originalité réside dans son échelle internationale. On mobilise des équipes internationales pour une durée de 24 à 48 heures, au cours desquelles des participants de diverses disciplines se réunissent pour résoudre des problèmes en utilisant le design thinking et d'autres méthodes créatives. Si l'entreprise a décliné le concept aux nouveaux maux du monde — notamment le Global Sustainability Jam et le Global GovJam — on fait encore l'économie de l'étape d'empathie et d'identification d'un problème, et on concentre toutes les énergies sur la génération d'un maximum de solutions.

  • Idéal quand vos équipes sont réparties géographiquement.
  • Génère un momentum motivant pour les équipes.

LEGO® Serious Play®

Robert Rasmussen et Per Kristiansen ont développé cette méthode dans les années 2000, en collaboration avec l'entreprise LEGO®. L'idée est d'utiliser les briques LEGO® pour encourager la communication, la résolution de problèmes et la créativité au sein des équipes. Les participants construisent des modèles en réponse à des défis spécifiques, puis partagent leurs réflexions et leurs histoires avec le groupe. Cette approche ludique aide à libérer la créativité et à favoriser un dialogue ouvert et constructif, et elle n'est pas réservée au design thinking en tant que tel.

  • Ce ne sont pas des briques LEGO ramassées au hasard dans la chambre de vos enfants! Ce sont des pièces précises qui ont une utilité et une signification précises.
  • LEGO® Serious Play® est une méthode, avec une "boite de départ" à acheter autour des 38$ (pour une personne). Le véritable "kit de groupe" varie entre 485$ de 790$ pour 100 sachets individuels (plus petits). Allez voir ici pour les détails.
LEGO® Serious Play®, photo Wikipedia

Brainwriting

Le brainwriting est une technique de génération d'idées qui ressemble au brainstorming, mais se concentre sur l'écriture plutôt que sur la discussion orale. Il a été développé par Bernd Rohrbach, un consultant en management allemand, en 1969. Il a publié cette méthode pour la première fois sous le nom de "Methode 6-3-5" : six participants génèrent trois idées chacun en cinq minutes. L'objectif est de permettre à chaque participant de partager ses idées sans être influencé ou interrompu par les autres. Le brainwriting est particulièrement utile pour encourager la participation des personnes introverties qui pourraient être moins enclines à s'exprimer dans des sessions de brainstorming traditionnelles. Depuis l'introduction de la méthode 6-3-5, d'autres variantes du brainwriting ont été développées pour s'adapter à différents contextes et groupes de participants.

  • Favorise les participants plus timides.
  • Très efficace pour la génération de noms par exemple (Perrier Jablonski s'en sert très souvent!).
  • Permet de véritablement bâtir sur les idées des autres.

Storyboarding

Les ateliers de scénarisation misent sur le dessin plutôt que sur l'expression orale ou écrite. Attention, on est loin d'une oeuvre d'art! On cherche plutôt à aider les équipes à visualiser et à raconter des histoires autour de produits, services ou expériences utilisateur. Les participants créent des séquences d'images ou de scènes pour illustrer des situations, des interactions ou des étapes clés du parcours utilisateur, permettant ainsi de mieux comprendre et de résoudre les problèmes.

  • Ne misez pas sur la qualité artistique, ce n'est pas le but!
  • Idéal pour designer des expériences (le storyboarding permet d'intégrer la notion de temps, le parcours, les actions successives, etc.)

Fishbowl

Les ateliers Fishbowl sont plutôt pratiqués dans le domaine de l'éducation, des affaires et de la résolution de conflits, ainsi que dans d'autres contextes où une communication ouverte et un échange d'idées sont essentiels. Dans un atelier Fishbowl, un petit groupe de participants s'assoit au centre de la salle et discute d'un sujet, tandis que les autres participants forment un cercle autour d'eux pour écouter et observer. Au fil de la discussion, les personnes du cercle extérieur peuvent rejoindre le groupe central pour partager leurs idées et poser des questions, favorisant ainsi une discussion ouverte et inclusive.

  • Un peu plus intimidant pour les gens qui ne se connaissent pas avant l'atelier.

World Café

Le World Café est un format d'atelier participatif qui facilite les conversations en petits groupes sur des questions spécifiques. Les participants se répartissent en plusieurs tables et discutent d'un sujet pendant un temps déterminé. Ensuite, ils changent de table et rejoignent une nouvelle conversation, permettant ainsi le partage d'idées et la découverte de nouvelles perspectives.

  • Assez basique, et très proche de ce que tout le monde faisait déjà... sans le nommer.
  • Nécessite une logistique minimale (temps de déplacement, organisation des tables).
  • Intéressant pour les audiences plus larges, avec des problématiques un peu plus anecdotiques. L'idée est de "brasser des idées".
  • Se pose la question de "ce que vous allez faire de toutes ces idées". Préparez-vous à y répondre!

Pour compléter cette liste, voici deux autres formes d'ateliers un peu différents.

Bootcamp de design thinking

Contrairement aux autres ateliers présentés ici, le bootcamp de design thinking est plutôt axé sur l'enseignement de la discipline. C'est un événement d'une durée variable, généralement de quelques jours à quelques semaines. L'idée est donc de former vos équipes aux principes et à la pratique du design thinking. On y partage les méthodes et les outils, et les participants travaillent en équipe sur des projets réels ou fictifs pour développer leurs compétences en matière de collaboration, de créativité et de résolution de problèmes.

  • Très intéressant pour découvrir le design thinking.
  • Important de confier ce genre d'atelier à des professionnels.
  • Génère un momentum intéressant pour vos équipes, sans engagement de résultat.

Le sprint design

Contrairement aux exemples plus haut, le sprint design se présente comme un processus de design thinking complet — ce qu'il n'est pas. C'est à John Knapp de Google Ventures que l'on doit le sprint design. Mis en marché en 2010, le sprint design est un processus structuré qui se déroule généralement sur une semaine. Les équipes collaborent pour définir un problème, générer des idées, créer des prototypes et tester des solutions avec des utilisateurs réels. Le sprint design permet aux équipes de valider rapidement des hypothèses et de prendre des décisions éclairées sans investir beaucoup de temps et de ressources dans le développement de produits. Le sprint design a fait des petits, notamment avec les Lightning Decision Jams AJ&Smart, lancés à grands coups de tutos colorés et de youtubeurs surexcités. Il mérite sa place ici, car la portion « idéation de groupe » demeure valide et présente un certain intérêt : celui de bloquer du temps dans les agendas. Mais... rien de plus.

  • Le sprint design est une copie conforme du design thinking, amputée de la portion d'empathie.
  • Il n'est véritablement utile que si un travail sérieux d'empathie pour connaître et comprendre l'utilisateur a été fait au préalable.
  • S'adresse le plus souvent à un public plus jeune, qui va pouvoir découvrir les bases.
Le sptint design Un design thinking éclair... mais incomplet.

Ce qu'il faut retenir

Depuis les années 90, le design thinking a fait de nombreux petits, focalisés sur l'étape de génération d'idées. Nous avons voulu vous en présenter ici un large éventail, mais une réserve demeure : aucune de ces méthodes ne s'attarde véritablement sur les besoins et attentes des usagers, pourtant la pierre angulaire du design thinking. Le principal intérêt de ces méthodes est de vous offrir différentes options quand vient le temps de générer des idées, en fonction de vos objectifs, du contexte et des besoins spécifiques de votre équipe ou de votre organisation.

Gaëtan est le fondateur de Perrier Jablonski. Créatif, codeur et stratège, il est aussi enseignant à HEC (marque-média), à l'École des Dirigeants de HEC et à l'École des Dirigeants de Premières Nations (pitch, argumentation). Certifié par le MIT en Design Thinking et en intelligence artificielle, il étudie l'histoire des sciences, la philosophie, la rhétorique et les processus créatifs. Il est l’auteur d'un livre et d’une centaine d’articles sur tous ces sujets.
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Bibliographie et références de l'article
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